L'une fabrique du linge de maison de luxe, l'autre emploie des personnes handicapées. Ces deux structures ont un point commun : elles ont décidé de mobiliser leurs salariés pour participer à l'effort de lutte contre le Coronavirus.
Depuis quelques jours, les machines fonctionnent à plein-régime dans les ateliers de l'Adapei Pro 70 Rêpes Sud à Vesoul (Haute-Saône). Cette entreprise adaptée, spécialisée dans la découpe et l'assemblage de pièces automobiles ou de literie, emploie 70 salariés handicapés. Mais à l'heure où la France manque cruellement de masques pour faire face à l'épidémie de Coronavirus, l'Adapei a souhaité être solidaire. Son objectif : parvenir rapidement à transformer son process de fabrication afin de produire des masques en grande quantité.
Nous voulons participer à l'effort national de lutte contre le coronavirus
« C'est un très gros défi pour nous » précise Jean Marc Phommavong, le directeur général adjoint d'Handy'Up. Ce groupe associatif est né du rapprochement entre l'Adapei et l'Agei, qui gère elle aussi des établissements pour personnes inadaptées. « Nous sommes nous-même touchés de plein fouet par cette crise. Nous avons récemment enregistré le premier décès d'une personne accompagnée dans le cadre de nos accueils de jour et nous avons souhaité apporter notre contribution à l'effort national pour la fabrication de masques en urgence...».
« Les équipes se sont mobilisées en un temps record »
Dès la semaine dernière, l'association a adressé des échantillons de masques à la Direction Générale de l'Armement. Ces derniers ont été testés méticuleusement, pour vérifier notamment s'ils filtraient efficacement les particules. Un contrôle couronné de succès.
Les masques ont été officiellement homologués. « L'obtention de cet agrément est une reconnaissance très importante pour nous » poursuit Jean Marc Phommavong « Cela va nous permettre d'équiper de façon préventive l'ensemble des professionnels de nos structures et ainsi de les prémunir du virus ».
Nous voulons fabriquer 13 000 masques par semaine
Après plus de deux semaines de préparatifs et d'aménagements intensifs la production de masques a pu débuter. « Toutes les équipes se sont mobilisées en un temps record. Nous allons produire 24h sur 24 et nos objectifs sont élevés » confirme Jean Marc Phommavong. "Dès le 1er jour, 1900 masques ont pu être fabriqués et nous espérons en produire 13 000 par semaine. Nous avons besoin de 5000 masques par semaine en interne. Le reste nous le fournirons gratuitement bien sûr, aux personnels soignants". Au total, l'association dispose de 3 soudeuses à ultrasons pour confectionner les masques. Mais le groupe PSA Vesoul a souhaité lui en fournir deux supplémentaires. Quant à la matière première, elle sera mise à disposition par le groupe Mérinos.
A quelques kilomètres de Vesoul, c'est à Luxeuil-les-Bains (Haute-Saône) que d'autres salariés se mobilisent. Leur entreprise, RKF Luxury Linen, fabrique du linge de maison de luxe, pour l'hôtellerie notamment. "Nous avons interrompu l'intégralité de notre production habituelle", précise Riadh Bouaziz son PDG. « Nous fabriquons désormais des masques et des surblouses pour les hôpitaux, les Ehpad, les infirmières libérales, les ambulanciers ou encore les employés de pompes funèbres. C'est pour nous un devoir de remercier l'ensemble du personnel soignant pour son dévouement ».
Nous avons réaménagé l'ensemble de nos ateliers
Là encore, l'entreprise a du s'adapter en un temps record. « C'est une organisation absolument exceptionnelle et inédite pour nous » poursuit Riadh Bouaziz. « En temps normal, pour mettre en place un tel modèle de production, il nous aurait fallu deux ou trois mois. Mais grâce à l'investissement incroyable de tout les salariés, nous avons réussi à adapter notre usine en quelques jours seulement. Tous les ateliers ont été réaménagés, nous avons acheté de nouvelles machines et il nous a fallu également remanier toute notre installation électrique. L'engagement collectif est magnifique ».
Des objectifs de production très élevés
Et pour faire face à la demande, RKF, va mettre les bouchées doubles, tout en appliquant de façon très strictes toutes les mesures de sécurité sanitaires : désinfection des machines très régulièrement, nettoyage des sols deux fois par jour et mise à disposition du personnel de gants, de blouses de protection, de masques et de gel hydroalcoolique. Des conditions de sécurité indispensables pour permettre à l'entreprise de réussir son pari « Nous voulons produire dans les délais les plus courts possibles. L'objectif est de fabriquer des dizaines de milliers de surblouses et plusieurs centaines de milliers, voire de millions de masques » confirme Riadh Bouaziz.
Les premières livraisons de matériel médical ont déjà eu lieu
Dans les ateliers, le travail a donc pu commencer dès cette semaine pour les équipes de fabrication. Et les résultats ne se sont pas fait attendre : les hôpitaux de Vesoul et de Belfort ainsi qu'un Ehpad de Belfort ont été les premiers établissements à bénéficier d'une livraison de matériel. Pas de temps à perdre, il faut s'adapter à l'urgence de la situation, c'est plus que jamais la volonté de Riadh Bouaziz et de ses salariés « Nous voulons continuer à monter en puissance car les demandes affluent chaque jour . Nous devons donc recruter du personnel et là encore, nous avons décidé d'aller très vite. Nous expliquons aux candidats qui souhaitent nous rejoindre, comment fabriquer une blouse et s'ils correspondent aux profils que nous recherchons, ils sont embauchés immédiatement et rejoignent aussitôt leur poste de fabrication ».
A Vesoul, à Luxeuil-les-Bains ou ailleurs, les initiatives se multiplient. Menées par des particuliers, des associations ou des entreprises, elles sont aujourd'hui le symbole de la longue lutte engagée contre le coronavirus.